L’évolution humaine que nous souhaitons

Lettre à Jean-Didier Vincent, neurobiologiste à propos du transhumanisme qu’il promeut (ceux qui ne connaissent pas peuvent découvrir sur internet) : je lui dis qu’on peut évoluer autrement, de l’intérieur. Novembre 2011.

J’ai lu avec intérêt l’interview que vous avez accordé au journal Le Point (13 octobre 2011) à propos de votre livre « Bienvenue en Transhumanie ». Je ne pense pas que je lirai ce livre mais ces deux pages d’interview m’ont motivée à vous écrire.

Si je comprends bien vos propos, vous souhaitez que l’être humain évolue, s’améliore, devienne un « posthumain », qui serait enfin débarrassé de cette forme de tare qui parait constitutive de notre humanité : produire du pire alors que nous souhaitons du meilleur. Et, toujours si j’ai bien compris, vous estimez que le transhumanisme est une bonne façon d’y arriver même si il reste quelques incertitudes (« que devient l’amour.. »).

Autant je vous rejoins dans le souhait d’une évolution de notre humanité, que j’appelle « évolution des consciences », autant je suis en désaccord avec vous sur l’idée que le transhumanisme puisse être le bon moyen d’y arriver. Il sera à mon avis exactement ce que l’on a toujours fait : producteur de pire quand on veut du meilleur. Pourquoi ? Parce qu’on va chercher dans la technologie, à l’extérieur de nous, des solutions « miracles ». Parce que « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Notre monde n’a pas besoin de plus de science ; il a besoin de plus, de beaucoup plus de conscience. Le transhumanisme saura fabriquer des humains robotisés, très utiles pour devenir militaires ou serviteurs zélés d’un pouvoir qui pourra facilement devenir de plus en plus totalitaire.

Pour cette évolution des consciences que je souhaite comme vous, je vois deux pistes principales, qui sont toutes les deux au cœur de l’homme et non dans une quelconque technologie.

La première : parvenir à comprendre que plus nous luttons contre quelque chose, plus nous lui donnons de la force. Cela marche comme ça au niveau énergétique et tout le vivant est fait d’ondes, de vibrations, d’énergie. Quand je donne de l’attention à quelque chose, je renforce ce à quoi je donne de l’attention. Que ce soit en étant « pour », que ce soit en étant « contre » ! Pour l’instant, la majorité des humains ne l’a pas encore compris. Et toutes nos batailles généreuses sont vouées à l’échec : la lutte contre le chômage, la lutte contre le cancer, la lutte contre la pauvreté… Nous luttons depuis des décennies et avons récolté plus de chômage, plus de cancers, plus de pauvreté… Cela éclaire quelque peut cette fameuse « tare » humaine. Je sais bien sûr que ce n’est pas si simple, qu’il y a des raisons « objectives » pour que nos combats n’aboutissent pas : crise économique, mauvaises conditions de vie, d’alimentation, etc. Mais profondément, derrière ces raisons objectives, il y a des choix de société auxquels nous adhérons et qui ont créé le monde tel qu’il est : à notre image.

La deuxième piste : parvenir à ne plus nous assimiler à l’égo et à découvrir notre identité plus profonde. C’est un chemin spirituel de libération et il est à la portée de chacun d’entre nous. Pas besoin de technologie, de moyens, juste de l’attention et de l’intention. J’ai été très éclairée sur le sujet par le livre d’Eckhart Tolle, « Nouvelle terre ». Il nous explique que l’égo est une illusion (on s’en rend compte une fois qu’on s’en détache) et que pour maintenir cette illusion, l’égo travaille imperturbablement à se renforcer. La meilleure façon de le faire est de « se » distinguer des autres, que ce soit par la critique, l’accumulation de biens, les stéréotypes, etc. Cela mène inévitablement à l’aggravation des inégalités, aux guerres, bref au monde tel que nous le connaissons. Est-ce pour autant que notre égo est une « tare » humaine ? Je ne le pense pas car l’égo est nécessaire pour vivre sur cette terre. Par contre, il est hautement souhaitable que l’évolution de chacun de nous aille dans le sens d’une non-assimilation à l’égo, dans le sens de la découverte de notre nature profonde. Quand on la découvre, on constate par l’expérience qu’elle est unie à tout le vivant, pacifique, joyeuse, aimante, empathique… Et voilà la tare de notre civilisation : nous avoir éloignés de cette évolution par tous les moyens possibles.

Finalement, ces deux pistes procèdent d’un même mouvement, d’une même prise de conscience : la conscience de notre UNITE, unité les uns avec les autres, unité de tout le vivant. C’est en ayant conscience de cette unité qu’on arrête de lutter contre ce qui nous déplait, pour l’accepter, l’embrasser, le reconnaitre comme sien-soi et s’aimer ainsi. C’est en ayant conscience de notre unité que l’égo ne signifie plus grand-chose, juste un habit superficiel, puisque, en profondeur, l’autre est une partie de moi et je suis une partie de lui. Sur ces évolutions intérieures, à notre portée, je ne saurais trop vous recommander le livre témoignage de la neurologue Dr Jill Bolte Taylor, « Voyage au-delà de mon cerveau » : grâce à ses connaissances du cerveau, elle a pu analyser ce qu’elle vivait lors d’un AVC puis ensuite, étudier ce qui se passait pour elle au cours de son long rétablissement. On y découvre les facultés extraordinaires de nos deux hémisphères cérébraux, que ce soit pour le fonctionnement analytique ou pour cette conscience de notre reliance et de notre unité profonde.

S’il est vrai que le transhumanisme progresse, porté par des intentions plus ou moins louables à mon avis, la bonne nouvelle c’est que cette évolution profonde des consciences progresse également. Elle est moins visible car les médias n’en ont cure mais elle est réelle. Je peux vous renvoyer au livre de Marc Luyckx Ghisi : « Surgissement d’un monde nouveau » qui le montre bien.

Article présent dans la rubrique Ce qui me passionne, Ce qui me tarabuste, Evolution des consciences, Industrialisation du vivant, Nano-technologies.
 
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